Quand chocolat rime avec Milka

Les mythes anciens se renouvèlent : la lutte du faible contre le fort, illustrée jadis par le combat légendaire de David contre Goliath, trouve aujourd’hui de nouvelles arènes dans la lutte de Milka, humble couturière drômoise - qu’il est convenu d’appeler par son prénom -  contre la société Kraft Foods, multinationale basée en Suisse.


Aujourd’hui pourtant, avec son illustration, c’est la signification profonde du mythe qui se trouve altérée : oui, évolution de la société oblige, c’est la partie la plus forte qui triomphe et terrasse le faible. Dans cette mêlée, un arbitre : le juge ; et une règle : le droit de la propriété intellectuelle. 

C’est ainsi la Cour d’Appel de Versailles qui, le 27 avril dernier, a confirmé la solution d’un litige aux contours insolites : Milka, couturière de 58 ans installée à Valence, avait acquis en 2000 le nom de domaine milka.fr et en avait fait, sur fond mauve, une page d’information sur son commerce. La société Kraft Foods, détentrice des marques Milka et, tenez-vous bien, de la couleur mauve-lilas attachée au pelage de la vache bien connue, s’offusquant de la confusion possible dans l’esprit du public entre cette banale couturière et son très respectable bovin, prit l’initiative d’une procédure devant les tribunaux judiciaires, reprochant à Milka une exploitation injustifiée de la notoriété de ses marques ; laquelle exploitation, au surplus, lui causait un préjudice.


Le Tribunal de Grande Instance de Nanterre, par un jugement du 14 mars 2005, avait donné raison à la multinationale. Aux motifs que l’usage par Milka de son prénom, qui, contrairement au nom patronymique, ne donne aucun droit à son usage dans la « vie des affaires », n’est pas justifié par un droit protégé et qu’il est de nature à banaliser la marque Milka et à affaiblir son pouvoir distinctif, la Cour d’Appel va confirmer cette décision.

Dans son raisonnement, cependant, il est un point où le bât blesse : s’il est exact que le prénom ne donne en principe aucun droit à son usage dans le domaine commercial ; il en est autrement lorsque son titulaire parvient à démontrer que, sous ce prénom, il a acquis une certaine célébrité. Or il est incontestable que, depuis le début de la procédure tout au moins, Milka est devenue, en France, une célébrité ! Il faut en juger par l’intérêt que la Presse lui a porté pendant tout le déroulement de son épopée, par le nombre de communiqués qu’elle s’est appliquée à faire publier, par le site Internet dédié au soutien de sa cause…

Remarquez toutefois que si cette renommée ne lui a pas permis de gagner son procès, elle n’a cependant pas été inutile, car Milka n’a vraisemblablement jamais autant cousu depuis qu’elle en découd avec la Justice !