Les règles en matière d'étiquetage des OGM en Europe et en France

La réglementation européenne – les textes applicables

Les textes applicables en la matière sont principalement les Règlements n° 1829/2003 et 1830/2003, relatifs respectivement aux denrées alimentaires et aliments pour animaux génétiquement modifiés, et à la traçabilité et l’étiquetage des OGM. Ces Règlements européens sont directement applicables dans les Etats membres, sans qu’aucune procédure nationale de transposition ne soit nécessaire.

Pour en faciliter l’interprétation, ces textes ont été complétés, notamment, par un rapport de la Commission Européenne sur l’application du Règlement n° 1829/2003, en date du 25 octobre 2006.

Ils doivent également être regardés à la lumière des dispositions nouvelles du Règlement n° 834/2007 relatif à la production biologique et à son étiquetage. 

Le Règlement n° 1830/2003

Le Règlement n° 1830/2003 a pour champ d’application les produits – denrées alimentaires et aliments pour animaux - consistant en OGM ou produits à partir d’OGM (lécithine, amidon…).

Il ne s’applique pas aux médicaments vétérinaires.

Pour les produits inclus dans son champ d’application, le Règlement n° 1830/2003 fixe des règles d’étiquetage obligatoires, qui peuvent toutefois être écartées si la présence d’OGM dans le produit mis à la vente n’excède pas le seuil de 0,9 % et si cette présence est « fortuite ou techniquement inévitable ».

Cette double condition est souvent méconnue par les opérateurs économiques concernés. 

Le Règlement n° 1829/2003

Le Règlement n° 1829/2003, quant à lui, décrit les procédures communautaires à l’issue desquelles sont délivrées les autorisations de mise sur le marché des OGM.

Il contient également des dispositions sur l’étiquetage des OGM, qui rejoignent celles précédemment mentionnées du Règlement n° 1830/2003.

 

Une lacune majeure : aucun étiquetage sur les produits issus de l'élevage

La réglementation européenne sur l'étiquetage obligatoire des OGM sur les denrées alimentaires et les aliments pour animaux ne prévoit aucun étiquetage sur les produits issus de l'élevage. 

Les consommateurs ne savent donc pas, pour ces produits, si les animaux ont consommés, ou non, des OGM dans leur ration alimentaire. 

C'est la raison pour laquelle les OGM n'ont toujours pas fait, en Europe, leur apparition en alimentation humaine, mais sont présents, massivement, dans l'alimentation des animaux d'élevage. Ils sont très majoritairement importés des Etats-Unis, du Canada, du Brésil et de l'Argentine. 

Cette lacune a donné lieu à de multiples initiatives, de la part des industriels engagés dans des filières de qualité, ou de la part des Etats membres eux-mêmes, afin d'indiquer l'absence d'OGM dans l'alimentation animale

La réglementation européenne en matière d’étiquetage de type "sans OGM"

En matière d’étiquetage de type "sans OGM", la réglementation communautaire ne prévoit rien formellement.

Cependant, la rédaction de ses « considérants », son champ d’application, son interprétation par la Commission européenne, permettent de dégager une ligne d’interprétation probante, concernant notamment les deux difficultés que pose ce type d'étiquetage :

  • la question du seuil de présence tolérée des OGM,
  • et celle de l’utilisation des additifs alimentaires et auxiliaires technologiques, notamment, lesquels sont aujourd’hui fréquemment obtenus « à l’aide de » micro-OGM. 

La question du seuil

Concernant le seuil applicable à un étiquetage de type "sans OGM", la Commission donne sa position dans son rapport du mois d’octobre 2006 :


« 2) Les produits destinés à l’alimentation humaine qui peuvent ou non être génétiquement modifiés: ces denrées peuvent être mises sur le marché sans étiquetage GM à condition qu’elles contiennent moins de 0,9 % de matériel GM et que la présence de matériel GM soit involontaire et techniquement inévitable. Un étiquetage «sans OGM» ne peut être exclu a priori pour ces denrées alimentaires.»

Les additifs alimentaires et auxiliaires technologiques

Les additifs alimentaires sont des substances délibérément ajoutées aux aliments pour remplir une fonction particulière. Il s’agit en particulier des vitamines, des enzymes et acides aminés.

Les auxiliaires technologiques sont des substances non consommées en tant que telles mais utilisées dans la transformation des aliments pour répondre à un certain objectif technologique.

Ces deux substances peuvent être obtenues en laboratoire à l’aide de micro-OGM, par, notamment, la surexpression d’un gène chez une bactérie ou une levure génétiquement modifiée, laquelle est suivie d’une purification.

Ces produits sont soumis à des contrôles de sécurité sanitaire en vertu du Règlement n° 1831/2003.

C’est la raison pour laquelle ils n’entrent pas dans le champ d’application des Règlements n° 1829 et 1830 et ne sont donc pas soumis aux obligations d’étiquetage. 

L’étiquetage de type « sans OGM » dans les Etats membres

L’Allemagne et la loi du 1er avril 2008

L’Allemagne a adopté une nouvelle loi, le 1er avril 2008, visant à permettre dans des conditions assouplies un étiquetage de type "sans OGM" des produits n'ayant pas été élaboré avec des OGM, de manière directe ou indirecte. (Voir en particulier les §3a. et §3b.)

Cette loi est entrée en vigueur le 30 mai 2008. Elle interdit, dans ce nouveau cadre, toute utilisation de produits consistant ou obtenus à partir d’OGM au-delà et en deçà du seuil de présence fortuite ou techniquement inévitable de 0,9%, sans toutefois définir un autre seuil. Cette interdiction vaut également pour les aliments donnés aux animaux d’élevage.

Les additifs et auxiliaires technologiques administrés aux animaux ne constituent plus un obstacle à un étiquetage de ce genre. Aucune disposition législative ne les concerne.

En revanche, les additifs et auxiliaires technologiques utilisés dans les denrées alimentaires doivent, pour permettre un étiquetage de type "sans OGM", avoir reçu l’autorisation d’utilisation délivrée par la Commission européenne au titre des dispositions du nouveau Règlement n° 834/2007 sur l’agriculture biologique.

La preuve doit par ailleurs être valablement rapportée par celui qui met en œuvre un étiquetage de type "sans OGM", de la fiabilité et conformité de celui-ci avec les dispositions de la loi nouvelle.

Celle-ci vient enfin fixer les périodes pendant lesquelles, en matière d’élevage, les animaux ne doivent pas avoir consommé d’OGM avant d’être commercialisés avec la mention « sans OGM » (« ohne Gentechnik »), seule autorisée.

A noter enfin que l’utilisation de médicaments vétérinaires obtenus à l’aide d’OGM ne constituera plus en Allemagne un critère d’acceptabilité d’un étiquetage « négatif ». Ils sont ainsi librement utilisables. 

 

- Pour aller plus loin :

site du ministère allemand de l'agriculture et de la protection des consommateurs

- site de l'association allemande des producteurs "sans OGM", dite VLOG : http://www.ohnegentechnik.org/

 

Pour une version en français de la loi allemande
Loi allemande-FR.pdf
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Par ailleurs, l'Allemagne a récemment publié un guide pour les contrôles sur la présence d'OGM dans les aliments pour animaux. Ici dans sa version d'origine.
Leitfaden zur Kontrolle von GVO in Futte
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Guide pour les contrôles sur la présence d'OGM dans les aliments pour animaux, en version anglaise.
Guideline for the control of GMOs in fee
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Pour une bonne compréhension des dispositions de la loi allemande, voir également cette analyse, réalisée par Dr. Jochen Koester, de la société TraceConsult. Texte en anglais.
Supplying_Raw_Materials_GM-free.pdf
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L’Autriche et la "directive" du 6 décembre 2007

L’Autriche a également souhaité modifier sa législation, afin de pallier les lacunes du droit communautaire sur l’étiquetage des OGM sur les produits issus de l’élevage et de contrer l’augmentation mondiale des surfaces agricoles dédiées à la culture des OGM. Une « directive » a été votée le 6 décembre 2007. Elle est entrée en vigueur le 6 mars 2008.

Relativement au seuil admissible d’OGM, la directive autrichienne fait référence aux obligations d’étiquetage posées par les Règlements européens n° 1829 et 1830. Elle admet, partant, un seuil de 0,9 %. Cependant, cet apparent laxisme est contrebalancé par des dispositions prévoyant une gestion des risques de contamination en amont et des obligations fortes de traçabilité et d’informations entre opérateurs.

En ce qui concerne l’utilisation des additifs et auxiliaires technologiques obtenus à l’aide d’OGM, celle-ci est autorisée si plusieurs conditions sont satisfaites, tenant principalement à l’absence dûment constatée de substances de substitution, à la nécessité d’administration desdites substances, ainsi qu’à des autorisations préalables et des contrôles d’experts.

Le texte, particulièrement complet, prévoit également des démarches de certification et de contrôles de la production, afin d’établir la preuve de la conformité de l’étiquetage avec les dispositions de la directive. 

 

L'Italie et la région des Marche

La région des Marche, en Italie, a mis en place un label de qualité régionall, auquel est attaché un cahier des charges excluant les OGM dans l'alimentation des animaux ou dans les denrées alimentaires, ainsi qu'une procédure de traçabilité, par l'utilisation obligatoire d'un logiciel, permettant, en temps réel, l'information de l'autorité réglementaire sur les pratiques des opérateurs agricoles. 

Dans le reste du monde ...

Aux Etats-Unis, ce sont plus de 400 distributeurs qui se sont regroupés, à partir de l'année 2008, pour fournir aux consommateurs une information claires sur les risques présentés par les aliments transgéniques. Ce pays étant dépourvu de toute réglementation sur l'étiquetage des OGM, c'est tout un processus de certification, depuis la ferme jusqu'à l'étal, qu'il a fallu organiser. 

 

La Suisse a mis en place un label garantissant l'origine suisse, locale, des produits vendus. Le cahier des charges de ce label exclut l'utilisation des OGM pour l'alimentation des animaux ou la composition des denrées alimentaires. 

La situation en France

A l'origine : une doctrine administrative interdisant tout étiquetage de type "sans OGM"

En France, une « Note d’Information » de la DGCCRF, datant de 2003, et bien que sans valeur juridique, a jusqu’à 2008 interdit toute possibilité d’étiquetage volontaire. 

Elle prévoyait en particulier : 


« Lorsqu’un opérateur indique qu’un produit destiné au consommateur final ou à l’utilisateur final ne contient pas d’OGM au moyen de mentions du type « sans OGM », « non OGM » ou « PCR négatif », sa démarche doit répondre à plusieurs exigences:

 

1°) La présence de toute trace d’OGM doit être exclue. En d’autres termes, le seuil à retenir dans ce cas est la limite de détection à l’analyse et nullement la limite de quantification ou encore le seuil de présence fortuite de 0,9 %. (…)

 

2°) Aucun OGM, produit dérivé d’OGM ou produit obtenu à l’aide d’OGM (acides aminés, vitamines, enzymes…) ne doit avoir été utilisé à un quelconque stade d’élaboration du produit.

 

(…) En alimentation animale, cette règle s’applique aux matières premières, aux additifs, ainsi qu’aux produits non couverts par le décret n° 86-1037 du 15 septembre 1986 ou le décret n° 73-1101 du 28 novembre 1973 (auxiliaires technologiques, supports d’additifs…) »

 

La loi du 25 juin 2008 sur les Organismes Génétiquement Modifiés

Le vote de la loi française sur les OGM, qui fait référence à une définition communautaire du "sans OGM", a rendu obsolète la compréhension qu'avait l'administration des allégations volontaires. 

En effet, l'article 1er de la loi dispose : 

 

"Les organismes génétiquement modifiés ne peuvent être cultivés, commercialisés ou utilisés que dans le respect de l’environnement et de la santé publique, des structures agricoles, des écosystèmes locaux et des filières de production et commerciales qualifiées “sans organismes génétiquement modifiés”, et en toute transparence. La définition du “sans organismes génétiquement modifiés” se comprend nécessairement par référence à la définition communautaire. Dans l'attente d'une définition au niveau européen, le seuil correspondant sera fixé par voie réglementaire, sur avis du Haut conseil des biotechnologies, espèce par espèce."

 

Ces dispositions sont désormais reprises à l'article L. 531-2-1 du code de l'environnement.

Les évolutions les plus récentes

Le Conseil National de la Consommation, qui s'était déjà prononcé sur les allégations volontaires en matière d'OGM, s'est à nouveau saisi de cette question et a rendu son avis le 19 mai 2009.

Cet avis est le fruit d'un difficile compromis entre toutes les parties prenantes.

 

A sa suite, le Haut Conseil des Biotechnologies (Comité Economique, Ethique et Social) s'est prononcé, par des recommandations rendues publiques le 26 octobre 2009. 

 

Sollicité une deuxième fois, sur un projet qui lui était présenté par le gouvernement, le HCB s'est prononcé à nouveau par :

      ***

 

Enfin, le décret interministériel relatif à l’étiquetage des denrées alimentaires issues de filières qualifiées « sans organismes génétiquement modifiés » a été signé le 30 janvier 2012 et est paru au Journal Officiel le 31 janvier 2012

Il est pris pour l'application de l'article L.531-2-1 du code de l'environnement précité et de l'article L.214-1 du code de la consommation

 

Le décret prévoit des critères différents selon la nature des ingrédients qui composent les denrées :

  • Les ingrédients d’origine végétale (par exemple, la farine, l’amidon ou la lécithine) pourront porter la mention « sans OGM » s’ils sont issus de matières premières contenant au maximum 0,1 % d’OGM. Le décret prend soin de préciser que cette mention n'est valable qu'à condition que cette faible présence d'OGM soit "fortuite et techniquement inévitable".

 

  • L’étiquetage des ingrédients d’origine animale (par exemple, le lait, la viande, le poisson ou les œufs) précisera : 
    • pour les ingrédients non transformés qui proviennent d'animaux d'élevage, à l'exception du lait et des oeufs : « nourri sans OGM (< 0,1 %) » 
    • pour les ingrédients transformés qui proviennent d'animaux d'élevage, y compris le lait et les oeufs : « issu d'animaux nourris sans OGM (< 0,1 %) »

Dans ces deux cas, le décret prend soin de préciser que cette mention n'est valable qu'à condition que cette faible présence d'OGM dans l'alimentation des animaux soit "fortuite et techniquement inévitable".

 

OU

  •  
    • pour les ingrédients non transformés qui proviennent d'animaux d'élevage, à l'exception du lait et des oeufs : « nourri sans OGM (< 0,9 %) »
    • pour les ingrédients transformés qui proviennent d'animaux d'élevage, y compris le lait et les oeufs : « issu d'animaux nourris sans OGM (< 0,9 %) »

Dans ces deux cas, le décret fait cette fois référence, en ce qui concerne l'éventuelle présence d'OGM dans l'alimentation des animaux, aux obligations d'étiquetage du règlement n° 1829/2003 du 22 septembre 2003. (présence d'OGM fortuite ou techniquement inévitable)

Pour les ingrédients d'origine animale issus de l'agriculture biologique, cette mention peut être apposée sous réserve qu'elle soit complétée par les termes : « conformément à la réglementation relative à la production biologique ».

 

Concernant les durées minimales d'alimentation des animaux selon ces exigences, le décret fixe les conditions suivantes : 

- animaux destinés à la production laitière : 6 mois avant la production du lait destiné à être étiqueté

- volailles de chair : toute la durée d'élevage à compter du stade poussin de trois jours

- volailles destinées à la production d'œufs: la durée d'élevage à compter du stade poussin de trois jours ou au moins 6 semaines avant la période de production des œufs destinés à être étiquetés

autres animaux d'élevage : 1 année précédant l'abattage ou la pêche ou, pour ceux dont la durée de vie est inférieure à un an, les trois quarts de leur vie précédant l'abattage ou la pêche.

 

  • Les ingrédients d’origine apicole (par exemple le miel ou le pollen) pourront être étiquetés « sans OGM dans un rayon de 3 km ».

 

 

Ces allégations apparaîtront le plus souvent dans la liste des ingrédients, ou lorsque l’ingrédient mis en avant représente plus de 95 % de la denrée, dans le champ visuel principal de l’emballage.

 

Les infractions à ce décret seront punies comme contraventions de 3e classe, conformément à l'article L.214-2 du code de la consommation.  


Ce nouvel étiquetage sera applicable à compter du 1er juillet 2012, mais les consommateurs peuvent d’ores et déjà trouver des denrées alimentaires étiquetées « sans OGM » qui présentent les mêmes garanties que le nouveau décret.

En effet, en attendant la parution du décret, des initiatives volontaires avaient déjà vu le jour, à l'initiative de collectivités locales, d'ONG, de l'industrie...

 

 

Voir ici le communiqué de presse publié par Carrefour lors de la parution du décret
CP Carrefour Etiquetage sans OGM.pdf
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Les initiatives régionales

 

Les appellations d'origine sans OGM

En viande bovine:

En fromages:

En volaille:

Les initiatives de l'industrie

Label créé à l'initiative de certains industriels
Label créé à l'initiative de certains industriels

Les filières engagées

Depuis le 26 octobre 2010

Carrefour a décidé, depuis le 26 octobre 2010, de signaler plus de 300 références issues d’animaux “nourris sans OGM*”. C'est la seule enseigne de grande distribution à offrir cette information aux consommateurs. 

Greenpeace

Greenpeace publie aussi un guide des produits avec ou sans OGM.

Pour aller plus loin, sur d'autres aspects des OGM, voir en page suivante...